Malgré la croyance largement répandue, la qualité d'une décision ou la compétence d'un décideur ne peuvent être jugées au seul vu des résultats. C'est pourtant malheureusement le principe retenu, que ce soit en entreprise ou ailleurs, pour trier les bonnes décisions des mauvaises et, dans la foulée, les décideurs respectables des incompétents.
Ce principe est totalement erroné et néfaste de surcroît. Toute la question du droit à l'erreur repose justement sur un sérieux éclaircissement de ce principe. Voyons tout cela dans le détail.
Toujours chercher la justification d'une décision déjà prise. Ambrose Bierce (1842-1914) Journaliste américain.
Comment juger de la qualité d'une décision ?
Ce ne sera sûrement pas au seul vu des résultats !
Ah les
réunions de boulot ! Qu'est-ce que c'est épuisant d'entendre toujours les mêmes expressions ressassées !
Tenez Prenez par exemple le coup de monsieur Jourdain et de la prose. Dans une rencontre professionnelle, il y en a toujours un qui s'imagine original de ponctuer l'échange d'un "C'est comme monsieur Jourdain, il fait de la prose sans le savoir !"
Oh là !. Ça en fait un paquet d'années qu'on nous la ressort celle-là !
Elle doit sûrement réveiller en nous quelque chose de coincé entre Racine et Corneille. En ces temps de potache, quand on usait nos fonds de culotte sur les bancs du collège, Molière était en effet une forme de soulagement, en tout cas moins barbant que les deux autres.
Les conseilleurs à rebours
Les pires ennemis du décideurs : les donneurs de conseils à rebours et autres blâmeurs.
Des Yaka Fokon…
Une autre expression est tout aussi lassante. C'est la référence au "
Yaka Kokon". À croire que l'entreprise ne serait peuplée que de conseilleurs aux bras coupés, toujours prêts à proposer une réponse simple qui commence par une formule du type
"Il suffit de…". Mais attention, à la condition que ce ne soient pas eux qui la mettent en oeuvre. Pas folle la guêpe !
Bon ! Ok, je vous l'accorde, ils sont assez nombreux et plutôt envahissants.
Mais cela dit, tout bien réfléchi, ce ne sont pas les plus nuisibles. Eux ne font rien ou pas grand chose. Ils ne font donc que peu d'erreurs.
… aux Tunorépadu
À mon avis les plus dangereux, ce sont les "pousse au regret". Ceux que l'on pourrait appeler les "
ifalépafercomça" et les "tunorépadu". Autrement dit, ceux qui n'ont que ces mots à la bouche "
Il fallait pas faire comme ça", "
Pourquoi tu as fait comme ça", "
Tu n'aurais pas dû " ou encore
"Tu aurais dû me demander avant, je t'aurais dit de ne pas le faire"…
Ah le conditionnel passé ! Voilà un temps de conjugaison bien peu constructif.
Bref, tous ceux qui se sentent en force pour juger a posteriori une décision prise par un autre.
Ces conseilleurs à rebours sont réellement les personnes dangereuses.
Rabat-joie de nature, destructeurs par vocation, ils sont des briseurs d'enthousiasme, des castrateurs de l'initiative.
Ils étouffent la fougue et la pétulance de la jeunesse, berceau de la force et de la créativité, et incitent à l'extension de l'indifférence, voire de la rouerie.
Accusé, culpabilisé, l'infortuné décideur n'a plus que le regret comme bouée pour son estime personnelle. "Je ne recommencerai plus" pensera-t-il. C'est bien là le but de la manoeuvre.
On ne juge pas une décision a posteriori. Ce serait trop facile !
Il faut s'ancrer bien au fond du crâne, et une bonne fois pour toutes, que la qualité d'une
décision ne se juge pas aux résultats. C'est comme ça.
Lorsque le temps est passé, lorsque le contexte s'est précisé, lorsque les premiers résultats ont pointé le bout de leur nez, le jugement est aisé. Les évidences apparaissent. La
décision difficile semble nettement plus facile une fois l'horizon bien dégagé. Évidemment !
Mais on oublie un peu facilement qu'au moment de la décision, celui qui décidait n'avait pas toutes les cartes en main. En fait, c'est exactement cela la décision en univers complexe et incertain. On ne dispose pas de toutes les cartes.
Pourtant, il faut s'engager. Il faut prendre le risque de choisir. Ou d'éliminer si vous voulez. Décider c'est choisir, mais c'est aussi éliminer.
Est-ce le choix le plus opportun ? L'avenir nous le dira. Mais le décideur ne peut en aucun cas être mis en cause.
À moins qu'il n'ait pas tenu compte d'informations disponibles à ce moment. Dans ce cas, il est impardonnable.
Autrement, on ne peut abuser de la position hautement confortable d'être plus avant dans le temps pour juger une décision prise. Trop facile ! Non seulement le terrain s'est éclairci, mais de plus on dispose de l'expérience apportée par la décision.
Une bonne décision ne peut se juger a posteriori. C'est ainsi !
Factuel Versus Feeling
Au risque de se répéter, un décideur qui ne procèderait pas à une analyse "factuelle" des informations disponibles au moment de la
prise de décision et se fierait uniquement à son "feeling" n'est pas pardonnable.
La décision, ce n'est pas une partie de dés (enfin pas toujours). Ensuite, la décision doit encore être mise en oeuvre, et c'est là où les différentes interprétations risquent de la détourner de sa vocation initiale.
Dans tous les cas, une décision n'existe qu'au moment où elle mise en oeuvre. Mais là c'est un thème en soi.
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de la mesure de la performance et de l’aide à la décision. Au fil de ces vingt dernières années, il a accompagné nombre d'entreprise en France et à l'International. Il est l'auteur de plusieurs livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème et connexes, vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et régulièrement réédités.
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À lire
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